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Anarchisme, agilité et développement

· 21 min read

L'instant musical

Premiers contacts

Un mélange d'un concert de punk et du meme de premier contact

J'ai écouté pas mal de punk dans les années 90 / 2000, essentiellement du "punk à roulette", très présent comme bande son des vidéos de bodyboard et de skate.

Même si l'anarchisme est souvent associé au punk, ça n'est pas vraiment le cas pour les groupes de punk californiens. On est plus sûr de la provocation à base de "je montre mon cul" que des revendications politiques.

Pourtant, il y a bien quelque chose qui unit beaucoup de groupes de punk et c'est le Do It Yourself.

Le DIY

Comme énoncé, le "do it yourself" est très présent dans la culture punk. On retrouve ça à plusieurs niveaux.

Les fanzines

Fanzine, la contraction de "fan" et de "magazine" est une publication élaborée par des passionnés. On y retrouve des chroniques d'albums, des reviews de concert ou n'importe quoi d'autre.

Ils sont auto-édités à base de photocopies, vendu lors des concerts ou par courrier.

Voici quelques fanzines que j'avais achetés et que j'ai retrouvés à la maison :

Il existe même à Poitier une Fanzinothèque maintenant !

Les distros

On retrouve beaucoup de labels indépendants dans le punk qui fonctionnent souvent en petits commités. Ces labels indépendants garantissent aux groupes une totale liberté de composition, de cadence, etc. Contrairement aux majors pour lesquels le groupe est vu comme un produit.

De la même manière, il existe des distros indépendantes qui s'illustre généralement par un gars dans son garage qui vend vinyles, CD ou cassette en VPC.

Les concerts

Qui dit musique, dit concert. Dans le punk, on retrouve les circuits classiques à travers les salles de concerts, mais également des lieux altérnatifs.

Évidements, on retrouve les bars, mais également des squats, des lieux improvisés, des champs, etc.

Dans les concerts, rien de conventionnel, il m'est par exemple arrivé de jouer le prix de mon entrée aux dés.

Dans les années 2000, j'avais vu le groupe sleeping in gethsemane à Nantes au fouloir qui était un squat. Une maison habitée par des squatteurs, avec une véranda et une piscine qui servait de salle de concert et les groupes jouaient dans la piscine.

À travers les fanzines, les distros et les concerts, transparait un vent de libertés de prises d'initiatives. Ça n'est pas toujours beau, pas toujours bien fait, mais ça a au moins le luxe d'exister. C'est fait avec le cœur et c'est déjà pas mal.

Des groupes politisés

Dans le punk, on retrouve de tout, y compris des groupes cathos ! On va laisser ceux-là de côté pour se concentrer sur ceux qui nous intéressent.

En plus d'un goût certain pour la provocation, on retrouve pour certains groupes des prises de position plus marquées sur la politique.

Il existe le mouvement straight edge dans le punk et le hardcore. Dans ce mouvement, ceux qui y adhérent ne consomment pas de drogues, ni alcool, ont des relations sexuelles dans les relations sérieuses et le véganisme est souvent mis en avant.

Parmi les groupes que j'ai écoutés, on peut citer Refused, AFI, Propagandhi ou encore Raein et Yage qui sont des portes paroles de ce mouvement.

Certains groupes comme Propagandhi vont encore plus loins, Anticapitaliste, Féministe, Végan, Pro LGBTQ+ etc, ils défendent les libertés de chacun et font la promotion d'auteurs, d'historiens et de médias activistes comme à l'époque Howard Zinn, Noam Chomsky, etc.

Est-ce qu'on ne se rapprocherait pas un peu de l'anarchisme ?

L'anarchisme, c'est quoi ?

Alors que je bouinais tranquillement sur l'internet, youtube me suggère une vidéo "Ni dieu, Ni maitres" sur l'histoire de l'anarchisme. Il m'en fallait pas plus pour creuser un peu plus le sujet.

L'anarchisme tente de concilier liberté et égalité : “Pleine liberté sans égalité, c'est la jungle, Pleine égalité sans liberté, c'est la prison“.

L'anarchisme né durant la révolution industrielle du 19e siecle. Alors que tout un tas d'avancées sont faites dans différents domaines (comme la médecine), les travailleurs des usines eux vivent dans des conditions désastreuses. Ils travaillent tous les jours, 12 heures par jour, et survivent dans la misère, enfant compris.

Dans ce context, Proudhon, le théoricien de l'anarchisme sera le premier à se réclamer anarchiste en utilisant ce terme de façon positive.

Il définit 3 formes de dominations :

  • l'état : par la force publique
  • le capitalisme : par la violence sociale
  • le clergé : par ces règles sociales
Portrait de Proudhon

Il souhaite la destruction de ces 3 formes de pouvoir, sans pour autant recourir à la violence.

"L'anarchie, c'est l'ordre sans le pouvoir"

Il préconise de nouvelles organisations gérées directement par le peuple sous une forme mutualiste en commençant par les banques.

Paradoxalement, il est aussi sexiste et pour l'esclavage, comme quoi, on peut être en avance sur certaines idées tout en étant un gros con.

Contrairement au communisme, qui prone une forme de pouvoir centralisé, les anarchistes sont contre et veulent installer un communisme libertaire sans état.

Bakounine, une figure de l'anarchisme dira :

“Prenez le plus grand révolutionnaire, mettez le sur le trône de toutes les Russies, vous en ferez un tyran en quelques années”

Une histoire de luttes

L'anarchisme est essentiellement une histoire de luttes. Pour faire court, on va rencontrer deux formes de luttes principales : la grève générale et l'action directe / propagande par le fait.

La grève générale, on connait bien, on arrête de travailler, on se rassemble, on manifeste, etc. L'idée est assez simple, en bloquant la production, on fait pression sur le patronat et l'état pour obtenir des avancées sociales.

Avec la propagande par le fait, le but est de faire un coup d'éclat, une action spectaculaire pour attirer l'attention et espérer déclencher quelque chose comme une insurrection par exemple. Dans ce mode d'action, on retrouve les attentats, notamment à la bombe.

Si on caricature un peu, on retrouve une sorte d'altérnance entre le mode grève générale et le mode action directe. La grève générale a tendance à perdre de son efficacité et certains vont se radicaliser pour gagner en impact. À l'inverse les coups d'éclat et attentats peuvent vite générer une incompréhension et un rejet de la population, ce qui va pousser à revenir vers des actions plus collectives.

Est-ce que ça marche ?

Comme l'anarchisme est essentiellement une histoire de luttes, on peut se demander si ça marche ou si, il existe des exemples concrets de mise en œuvre.

Il existe quelques exemples intéressants.

Les communes de Paris

Une barricade pendant les communes de Paris

Les communes sont un mouvement insurrectionnel contre le gouvernement de versailles en 1870-1871. Les communards prennent la ville et mettent en place quelques avancées intéressantes pour l'époque. La commune de Paris a été en avance sur le droit des femmes avec entre autre l'abolition de la prostitution, l'égalité salariale, facilitation du divorce. Le temps manque pour instaurer le droit de vote des femmes.

La révolution espagnole de 1936

Des révolutionnaires espagnol

Probablement un des exemples le plus spéctaculaire de mise en œuvre de l'anarchisme à grande échelle.

Alors que le front populaire vient de gagner les élections en 1936, un coup d'état militaire est organisé par Franco. Des bastions de résistance se forment, notamment en Catalogne et en Aragon.

En catalogne, les anarchistes prennent le contrôle de la région et mettent en place une organisation anarchiste de la société.

Des villes entières sont prises et deviennent des terreaux d'expérimentation.

Quelques mesures et actions en vrac :

  • Abolition de l’argent et salaire familiale en fonction des besoins
  • 75% des entreprises autogérées en catalogne : Cinema, théatre, boulangeries, tramway, taxis, bus, hotel, restaurant, textiles, cuir, petits commerces, petite et grandes entreprises etc, gérées de façon collective sans baisse de rendement
  • Education populaire / libertaire

Notre-dames des landes

Une maison autoconstruite à Notre-Dame des Lances

En 2010, suite à un projet d'aéroport à Notre-dames des landes, des opposants au projet s'installent sur le site pour empêcher les travaux.

Les zaddistes (zone à défendre) vont occuper la zone jusqu'en 2018, date à laquelle l'état décide d'évacuer la zone par la force.

Pendant 8 ans, les zadistes vont expérimenter différentes formes d'organisations collectives, agricoles, culturelles, etc.

Les habitats sont autoconstruits, notamment en torchis. Niveau agriculture, on va retrouver de l'élevage, de l'apiculture et du maraichage. À noter qu'il n'y a aucun organe de gouvernance.

La communauté met en place un système de justice le "cycle des douze" pour gérer les conflits internes, avec un système de tirage au sort.

Et encore d'autre ?

Ils existent plein d'autres exemples locaux ou internationaux longo maï, rojava, Christiania etc, vous ferez vos propres recherches !

En résumé

Loin du bordel et de la loi du plus fort l'anarchisme se traduit plutôt par de l'auto gestion, de la mise en commun et de l'éducation populaire.

La philosophie libertaire pourrait paraître très individualiste mais, lorsqu'on fonctionne sans hiérarchie, on se rend compte que la coopération et l'entraide sont indispensables.

Et dans l'IT ?

Faisons un bon dans le temps, dans les années 2010.

En tant que développeur, nos perspectives d'évolution, c'est de devenir analyste puis chef de projet, ensuite manager. Le développeur est considéré comme un pisseur de code qui va traduire les spécifications en code executable.

Le développement est considéré comme un coût, l'externalisation en mode forfait est la norme et ça peut même aller jusqu'à de l'offshoring.

Il n'est pas rare d'avoir des frameworks d'entreprise imposés et bien rigides et les éditeurs a license (oracle, DB2 etc) sont très implantés.

Côté méthodologie, on est sur du bon vieux cycle en V en mode tunnel, tout va bien.

Cycle en V

Le moral des développeurs est au plus bas, on peut sentir la révolte gronder.

Les sources d'oppression

Capture de la série Severance

Dans la situation décrite plus haut, on peut identifier une liste non exhaustive de sources d'oppression :

  • Les deadline : elles poussent à la surproduction, au code de mauvaise qualité et à la dette technique
  • La hiérarchie, manager ou RH : condition de travail dégradée, pression constante, manque de reconnaissance etc
  • Les process : lourdeurs, rigides, inadaptés au contexte réel
  • Les frameworks / outils imposés : manque de flexibilité, inadéquation aux besoins réels etc
  • Forfaits, les centres de services : aller / retour incessant entre le client et le prestataire, perte de sens etc
  • Les licences propriétaires, les éditeurs : coût, manque de contrôle, dépendance aux éditeurs etc
  • Et bien d'autres...

Tous ces aspects nuisent au travail, les développeurs sont déresponsabilisés, le travail perd du sens. Les injonctions contradictoires sont la norme. L'entreprise veut être productive, mais les employés sont sans cesse génés dans leur travail.

Chief happiness officer

Quand ça va mal au boulot, c'est bien connu, c'est de votre faute ! vous n'êtes pas assez heureux au travail !

Pour remédier à ça, heureusement, il existe une solution : le chief happiness officer (CHO).

À ça, on ajoute avec une bonne morning routine, le tour est joué, tous vos problèmes seront résolus !

Morning routine

Révolte chez les devs

Dans les années 2010, c'est l'emérgence des conférences. La première édition de Devoxx France a lieu en 2012, on voit des JUG se créer un peu partout en France.

Un discours de rebellion arrive dans les conférences et certains speakers poussent les développeurs à la désobéissance, en les incitant à faire des tests, du code propre, etc.

Bref : de la désobéissance par le craft !

Le logo du podcast "Artisan Développeur" de Benoit Gantaume est assez évocateur

Le logo du podcast Artisant développeurd de Benoit Gantaume

Un autre aspect qui va bousculer l'ordre établit, mais d'une façon un peu différente, c'est l'arrivée du noSql.
Le noSql et surtout les bases schemaless vont séduire les développeurs par leur simplicité d'usage, mais aussi parce qu'en reprenant la main sur la définition du schéma, on s'affranchit de la lourdeur des intéractions qui peuvent exister à cette époque entre les devs et les DBAs. Pas mal de solutions noSql sont open source, il est donc assez simple de les tester et de les déployer (souvent du shadow IT). La main mise des éditeurs de bases relationnelles est remise en cause et les bases opens sources noSql vont en profiter pour gagner du terrain. PostgreSQL va également en profiter pour s'imposer comme une alternative crédible aux bases propriétaires.

Les temps changent, les pratiques de dév s'améliorent, le métier de dév devient plus valorisé et l'open source monte en puissance.

Qu'en est-il de la gestion de projets ?

L'agilité

En plus de l'artisanat logiciel, on voit arriver à peu près en même temps "la mode" des méthodes agiles. La ou avec le cycle en V, on part en mode autoroute, avec de grandes chances de se planter en éxplosant le budget, ou bien ne livrant pas à temps ou encore en livrant un produit non conforme, et peut-être même les 3 à la fois, les méthodes agiles promettent de remettre le client et ses besoins au centre du projet.

Mais l'agilité ça n'est pas seulement de la gestion de projet, c'est aussi une façon différente de voir son équipe et les interactions entre les membres.

Voici quelques verbatims du manifeste agile :

  • Les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils
  • La réponse au changement plus que le suivi d'un plan
  • Des solutions opérationnelles plus qu'une documentation exhaustive
  • Construire des projets autour d'individus motivés, donnez-leur l'environnement et le soutien dont ils ont besoin, et faites-leur confiance pour accomplir le travail
  • Les meilleures architectures, spécifications et conceptions émergent d'équipes auto-organisées

On commence à se rapprocher de valeurs anarchistes non ?

L'agilité d'entreprise

Au niveau des grosses entreprises, des concepts novateurs comme l'entreprise libérée ainsi que l'holacratie font leur apparition.

La définition wikipédia de l'entreprise libérée est la suivante :

Le terme entreprise libérée désigne « une forme organisationnelle
dans laquelle les salariés sont totalement libres et
responsables dans les actions qu'ils jugent bon — eux et
non leur patron — d'entreprendre. »

Ici, on n'est pas encore au niveau des usines autogérées d'Espagne car, cette organisation est imposée par les patrons, cependant des espaces de liberté existent pour les employés, et c'est quand même un point intéressant.

On regrettera quand même le retour arrière de certaines boites comme Castorama qui finalement n'ont pas réussi à maintenir ce modèle.

Safe

Avec l'engouement pour l'agilité, il fallait bien que ça arrive, le framework SAFe (Scaled Agile Framework) est né. Anti agile au possible, il séduira les grosses entreprises en quête de normalisation et de contrôle.

Process Safe

Le modèle SPOTIFY

Contrairement à SAFe, le modèle SPOTIFY est un modèle d'organisation qui met en avant l'auto-organisation des équipes. Il n'impose pas de process rigides, mais propose des principes d'organisation.

L'idée est d'avoir des tribus qui sont responsables d'un domaine métier. Dans ces tribus, on retrouve des squads qui sont des équipes responsables de produits. On doit retrouver dans la squad toutes les compétences nécessaires pour livrer le produit : dev, ops, BA, UX, PO, etc.

Il existe également les guildes qui sont des communautés de pratiques transverses aux squads et tribus.

Schéma du modèle spotify avec les tribus, les squad, les guildes et les capter

À la MAIF, nous avons adopté ce modèle d'organisation depuis plusieurs années maintenant. On était organisé en silo technique auparavant DBA, middleware, tibco, cobol, JAVA... et il fallait faire travailler tout le monde ensemble pour faire évoluer une fonctionnalité. Difficile dans ce contexte de livrer rapidement de nouvelles fonctionnalités, le time to market en prend pour son grade.

Autre aspect de l'organisation à la MAIF qui n'est probablement pas dans le modèle SPOTIFY, c'est le fait que rattachement hiérarchique soit différent du rattachement opérationnel. Mon chef qui est le chef des leads developpeurs, ne travail pas de mon équipe produit. Ceci a pour conséquence qu'il n'existe pas de rapport hiérarchique entre les membres de l'équipe. Chacun remplit sa fonction et les décisions sont prises collectivement ou portées par un rôle.

Quête (de liberté) d'autonomie

C'est bien d'avoir une organisation qui favorise l'auto-organisation dans l'équipe, mais pour que ça fonctionne, il faut que les équipes aient un maximum d'autonomie.

L'autonomie ça n'est pas uniquement d'avoir tous les profils dans l'équipe, c'est aussi limiter au maximum les couplages, qu'ils soient techniques ou organisationnels.

Le DDD (Domain Driven Design) est une approche qui permet à travers le concept de context borné (Bounded Context) de découper le système en plusieurs sous-systèmes les plus indépendants possibles.

Photo d'un event storming avec des post-it

Il existe plusieurs outils et ateliers pour définir les Bounded Contexts, très bien décrits sur cette page

Schéma sur la mise en évidence de contextes bornés

Un des outils que j'apprécie particulièrement, c'est le context mapping. Il permet de mettre en évidence les dépendances et les couplages qui peuvent exister entre plusieurs domaines qu'ils soient au niveau technique ou au niveau des interactions entre équipes.

Les items du context mapping

À partir de ce mapping, on peut identifier les points de friction et travailler à les réduire.

Refus (d'autorité) de couplages !

Pour maximiser la liberté et l'autonomie des équipes, il faut faire la chasse à tous les couplages.

  • Il faut challenger l'impact des process
  • Il faut challenger l'impact des frameworks
  • Il faut challenger l'impact des normes
  • Il faut challenger l'impact des communs
  • etc

Il n'est pas inutile de faire de la mise en commun, cependant les mises en commun doivent être réfléchies et conçues pour minimiser au maximum les adhérences.

Éducation populaire

Dans notre milieu, il existe beaucoup de manières d'appendre des choses et de se former sans suivre la voix classique de la formation.

Dans le contexte de son équipe :

  • le pair programming
  • le mob programming
  • les kata
  • la veille
  • etc

Dans le contexte de son entreprise

  • hands on
  • conférence interne
  • pizza conf (à la MAIF, on organise des visionnages de conf en mangeant des pizzas)

Dans un contexte externe

  • conférence
  • meetup
  • etc

Mon (usine) équipe autogérée

Si on met tout ça bout à bout, nous avons une équipe autonome qui gère son/ses produits. Comme vu plus tôt, tous les métiers sont représentés :

  • product owner
  • développeurs / lead développeurs
  • business analyst
  • ops
  • ...
Un groupe de musique ou chaque membre est annoté d'un role d'une squad : dev, lead dev, ops, BA etc

Il n'existe pas de rapports hiérarchiques entre les membres de l'équipe, chacun contribue à la bonne réalisation du produit et chacun doit apprendre à collaborer avec les autres. La prise de decision est collective, les pratiques se construisent ensemble et évoluent en permanence.

Pour conserver au maximum sa liberté d'agir et sa capacité à délivrer, l'équipe fait la chasse aux couplages, qu'ils soient techniques ou organisationnelles.

Le savoir est partagé, les débutants doivent pouvoir monter en compétence et être intégré dans l'équipe.

Une vraie usine autogérée.

Est-ce la solution ultime ?

Bien évidemment, non !

Pour commencer, il faut trouver une boite qui accépte ce genre de fonctionnement et même quand notre employeur offre ces espaces de libertés, il faut que l'équipe s'organise. Comme on a tendance à reproduire ce qu'on connait, certains individus vont vite chercher à jouer le rôle de chef.

Ensuite, il va y avoir certains challenges à relever.

La gestion de communs

Comme évoqué précédemment, avoir des communs, c'est se coupler mais pour autant avoir des communs, c'est mutualiser de l'effort.

Mais alors que faire ? Pas de bonne réponse ici, il faudra trouver des compromis, jouer sur le design etc.

Esprit SAAS

Une façon de limiter les coupables, c'est de penser les produits en mode "software as service" (SAAS) pour qu'ils soient utilisable en self service.

On pourra limiter en partie certaines interactions avec l'extérieur ainsi que du support.

Le manque de cadre

Les équipes étant composées de profils divers et variés, il y aura forcément des conflits. Entre ceux qui veulent aller vite, ceux qui veulent que tout soit parfait, ceux qui ont besoin de sécurité, ceux qui veulent des process et du cadre etc. Je vous invite à voir la présentation d'Anne-Laure Gros qui montre comment l'équipe devient meilleure quand elle est variée.

Le challenge de l'équipe sera de prendre en compte les besoins et aspiration de chacun et de trouver des compromis.

Gestion de conflits

Quand il y a un chef, la gestion de conflit est assez simple, le chef tranche et c'est finit.

Mais dans un groupe sans chef, il faudra que le conflit soit géré par le groupe.

Comment travailler ensemble ?

Une équipe sans chef n'est pas totalement désorganisée. L'équipe est organisée par spécialisation, chaque personne de l'équipe est déjà spécialisée grâce à son rôle (dev, ba, ops, etc).

Mais je pense qu'on peut aller plus loins ! Partager correctement les informations, spécifier ensemble, prendre des decisions collectives, etc. Il y a du travail !

J'ai parcouru la chaine fouloscopie dans l'espoir de trouver des réponses, mais malheureusement même si c'est très intéressant, ce qui est montré s'applique à des groupes plus grands que nos équipes produit.

La douche froide en partant !

Un ex-collègue de promo d'école d'ingé me partageait l'effondrement d'une personne qui avait adoré travailler dans une équipe auto gérée et qui a très, très mal vécu de changer d'équipe et de revenir dans un fonctionnement classique. Et oui, ce sont aussi des choses qui arrivent.

L'équipe est fragile !

C'est connu, à chaque fois qu'un personne arrive ou qu'une personne part, l'équipe change et devra se réadapter.

Mais un changement n'est pas forcément négatif, il faudra profiter de ce nouveau membre pour amener un peu de fraicheur dans les pratiques, challenger la documentation etc.

Les sujets transverses

Dans une organisation composée d'équipes produits autonomes, il faudra trouver un mode d'organisation pour les sujets transverses.

Il arrive que des sujets soient multi domaines (par ex : contrainte juridique etc) et il faudra par moment coordonner les squads produit.

L'autonomie ne sera pas totale !

Prises d'initiatives

Le modèle tient malheureusement beaucoup sur les prises d'initiatives et sur la culture de chacun.

Obtenir cet espace de liberté ?

L'organisation du travail n'est probablement pas le combat de prédilection des syndicats, mais ça pourrait très bien être un combat à mener.

Alors ? vous êtes tous des anarchistes ?

Fat mike qui fait un doigt d'honneur Brody Dalle qui fait un doigt d'honneur

Ça sera à vous de répondre à cette question !

Vous l'aurez compris, cet article, c'est une façon un peu fun de parler de punk, d'agilité et d'intelligence collective.

Est-ce qu'une équipe autogérée c'est de l'anarchie ? Probablement pas !

Ceci étant dit, on peut facilement faire des ponts entre des valeurs anarchistes et des valeurs de l'agilité. L'agilité ça n'est pas seulement des sprints et un package de rituels à respecter, c'est avant tout de mettre le client au centre et laisser travailler l'équipe. En plus des besoins du client, le produit doit tourner en prod (c'est le minimum), être fiable (non buggé) et évolutif (time to market). On s'en fout de savoir si la messe est en latin ou si on a bien réspecté le sprint poker ou je ne sais quel autre rituel, laissons l'équipe et l'intelligence collective faire son travail !

Ceux qui se sentent autonome dans leur travail et qui font face au micro management un peu trop zèlé, se retrouveront très certainement dans un modèle d'organisation plus anarchiste. Malheureusement, ces environnements, ne sont pas si courant et méritent d'être défendu quand ils existent.

Un jardin sur sol vivant connecté, mais pourquoi donc ?

· 20 min read

Ça fait maintenant quelques années que je jardine. Quand j'ai démarré, j'ai suivi quelques chaînes YouTube de permaculture, mais cette année la chaîne Ver de Terre Production a sorti l'équivalent d'une formation de 5 jours sur le maraîchage sur sol vivant plutôt à destination des professionnels :

Cette formation est animée par François Mulet, qui a mené avec son frère une exploitation MSV pendant plusieurs années tout en effectuant un certain nombre de recherches sur le sujet. Ses recherches s'appuient sur un mélange de bibliographie sur des papiers de recherche, accompagnées d'expérimentations et d'observations sur le terrain.

La formation est plus qu'une formation pratique : c'est une rétrospective de ses recherches avec des ouvertures sur ses travaux en cours. Un des buts de cette formation est d'avoir des clés de compréhension sur le fonctionnement du sol afin d'être en mesure de faire les bonnes analyses et de prendre les bonnes décisions pour mener ses cultures.

J'ai suivi cette formation et ça a ouvert pas mal de perspectives, dont je vais vous parler.

L'instant musical

Le labour

Pour beaucoup de monde, quand on pense jardinage ou agriculture, on imagine le jardinier travailler son sol à la sueur de son front, bêche à la main, retournant la terre pour planter ses graines.

Travail du sol mécanisé avec un motoculteur

Le labour résout pas mal de problèmes : il permet de se débarrasser des mauvaises herbes et d'ameublir le sol. En incorporant de l'air, on accélère l'oxydation de la matière organique, ce qui libère des nutriments pour les plantes.

Mais au fur et à mesure des labours, on finit par brûler toute la matière organique et le sol s'appauvrit. En s'appauvrissant, il retient moins bien l'eau et se compacte. Il devient difficile à travailler et de plus en plus pauvre. Le sol sera sujet à l'érosion, il sera lessivé par les pluies et on obtiendra une terre de moins en moins fertile.

Autre effet de bord : chaque labour libère du CO₂ dans l'atmosphère. A priori, 30 % des émissions de CO₂ sont dues à l'agriculture, et une grande partie de ces émissions sont dues au labour.

Les États-Unis ont subi de plein fouet les effets du labour dans les années 30 avec le Dust Bowl.

Dans certains milieux écolos, on prône le retour des chevaux pour labourer, mais qu'on laboure avec un cheval ou un tracteur, l'effet reste le même : on brûle la matière organique et on appauvrit le sol.

Dans l'agriculture moderne, bio ou conventionnelle, le système de culture n'est pas autofertile. On crée donc progressivement un désert.

Pour compenser, il faut apporter des engrais qu'ils soient chimiques ou biologiques. On est obligé d'être au chevet des plantes pour avoir une production.

Autofertilité naturelle

Si on laisse la nature faire, ça pousse tout seul !

Mais comment ça marche ?

Dans une forêt, en hiver les arbres perdent leurs feuilles qui tombent au sol. Elles forment une litière décomposée par la vie du sol (bactéries, champignons, vers de terre, insectes, etc.). Cette décomposition libère des nutriments absorbés par les racines.

Illustration avec un schéma emprunté sur Internet (auteur inconnu) :

Le taux de matière organique augmente au fil des ans et le sol devient de plus en plus fertile. Contrairement aux champs cultivés, le sol s'agrade.

Structure du sol

La structure du sol ne fait pas directement pousser les plantes, mais elle constitue un bon support de culutre.

Plus la matière organique augmente, plus le sol se structure. On limite la compaction et il absorbe mieux l'eau. Le minéral, l'argile et la matière organique s'agrègent et forment le complexe argilo-humique.

Vous avez peut-être déjà vu ce genre d'images :

À gauche : une carotte de sol non labouré ; à droite : un sol labouré. On comprend ce que ça donne lors d'orages : la terre est lessivée et part vers la mer.

À l'inverse, un sol structuré et riche en humus agit comme une éponge : l'eau est retenue et les plantes peuvent en profiter plus tard. Dans les forêts, l'eau filtrée est claire dans les ruisseaux.

Un sol bien structuré sera donc un bon support de culture. Il sera assez souple pour que les racines puissent s'y développer, et permettra une bonne retention d'eau tout en évitant l'hydromorphie.

Fertilité du sol

Contrairement à l'approche conventionnelle où la fertilité est apportée par des engrais, dans le modèle MSV c'est la vie du sol, et particulièrement les vers de terre, qui construit la fertilité.

En bref, un ver de terre mange de la matière organique déjà partiellement décomposée par les bactéries et champignons. En parcourant ses galeries, il tapisse les parois de mucus et déjections utilisables par les racines.

Marcel Bouché, chercheur français, a étudié les vers de terre toute sa vie. À partir de ses travaux, on sait comment vive les vers de terre, mais on peut aussi estimer (règle de trois) la quantité d'azote assimilable produite en fonction de leur densité.

https://www.verdeterreprod.fr/wp-content/uploads/2022/11/BOUCHE_Vers_de_terre.pdf

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Il existe 3 catégories de vers de terre :

  • Les endogés : ils ne forment pas de galeries pérennes (ils rejettent la terre ingérée).
  • Les épigés : vivent à la surface, mangent la litière, ne creusent pas profondément, meurent si le sol sèche, et se reproduisent très vite.
  • Les anéciques : creusent des galeries verticales profondes, consomment la litière et descendent la matière organique en profondeur.

Les vers de terre anéciques sont les plus intéressants pour le maraichage et plus généralement en agriculture. Ils apportent de la matière organique en profondeur, et permettent aux racines des plantes de se développer dans leurs galéries. Les épigés peuvent être intéressants dans les systèmes maraichers, car ils ont une grosse capacité de reproduction tant que le sol ne sèche pas. C'est souvent le cas dans les systèmes maraichers qui sont irrigués. Quand on démarre, on va pouvoir très rapidement constituer une population d'épigés.

1 tonne de vers de terre / ha / an consomme ~25 t de matière sèche / ha / an et produit ~500 unités d'azote / ha / an.

Une culture pro nécessite environ 2000 unités d'azote / ha / an → ~4 t de vers / ha / an → ~100 t de matière sèche / ha / an de litière. En gros, si on met un coup de bêche, on devrait voir 10 vers de terre en situation attendue.

Les bactéries fixatrices d'azote (libres) semblent également avoir un rôle important dans la fertilité des sols.

Quelle matière organique utiliser ?

Toute matière organique a minima carbonnée est bonne. Plus elle est ligneuse (BRF, broyat), plus il restera des résidus après décomposition. Plus elle est cellulosique (paille, foin), moins il restera de résidus. Il faut donc apporter davantage de ligneux pour un effet équivalent. La matière cellulosique est un peu plus "optimale", mais tout fonctionne. Le mieux : ce qui est disponible localement.

Le GCBR (Groupe de Coordination sur les Bois Raméaux) a mené des études sur plusieurs types de MO dont les résultats sont publiés ici : https://www.verdeterreprod.fr/publications-du-gcbr-sur-le-brf-bois-rameal-fragmente/

Et la faim d'azote ?

La faim d'azote se produit lorsque de la matière organique est en cours de décomposition. Les bactéries et les champignons vont mobiliser tout ce qui est disponible pour décomposer la matière. Les plantes ne peuvent donc pas pousser dans ces conditions. Les feuilles sont jaunes et tout est au point mort.

La bonne nouvelle, c'est que la faim d'azote se produit uniquement là où la matière se décompose. Donc si la matière organique est déposé en surface et que les plantes sont plantées dans la terre, il n'y aura aucun impact.

Système MSV

Le maraichage sol vivant exploite tous les concepts énoncés précédemment.

En général, on va apporter de la matière organique en surface, sous forme de compost, de BRF (bois raméal fragmenté), de paillage, etc. Cette matière organique va être décomposée par la vie du sol, et mangée par les vers de terre, ce qui permettra aux plantes de pousser en se nourrissant dans les galeries du mucus produit par les vers.

La bâche plastique est un outil de travail très intéressant quand on ne laboure pas. Elle permet de contrôller les mauvaises herbes et de garder l'humidité du sol. Quand on a un jardin, une bonne épaisseur de paille peut suffire à contrôler les mauvaises herbes.

Exemple avec la ferme de Cagnolle :

Reconstruire un sol

Quand on part de zéro, si le sol est pauvre avec peu de vers de terre, la stratégie est d'apporter 15 à 20 cm de matière organique et de brasser ça avec la terre sur 20 cm de profondeur. Ceci permettra de restructurer le sol et de former le complèxe argilo-humique. Un apport massif de matière organique non compostée va créer une faim d'azote. Comme ici, la matière organique est mélangée à la terre et non en surface, on ne pourra rien faire pousser pendant 6 à 8 mois, le temps que la faim d'azote passe.

Une fois la faim d'azote passée, il sera possible de planter, mais attention, tant que les vers de terre ne sont pas revenus, le sol ne sera pas encore assez fertile. Il faut compter 18 mois pour le retour des vers de terre anéciques mais on peut compter 6 mois pour le retour des vers de terre épigés, en mettant quelques vers de terre au début et en s'assurant de garde le sol humide.

La maison témoin de cette pratique, c'est le talus à marseille.

Dans ce projet, ils sont partis d'un terrain vague, avec un sol très pauvre et très peu de vers de terre.

Le terrain avant les travaux

Terrain avec de la terre en très mauvais état

Étape 1 : Niveler le terrain

Le terrain est nivelé

Étape 2 : Apporter de la matière organique

Apport de matière organique mélangée à la terre

Après la faim d'azote, on peut planter

Cultures après avoir restauré le sol Comparaison avant / après

MSV à l'extrême

Si on résume, pour créer un jardin MSV, il faut :

  • dans un premier temps restaurer le sol
  • tous les ans : un apport de matière organique
  • on garde le sol couvert en permanence (apport de MO)
  • on contrôle les mauvaises herbes avec une bâche ou du paillage

On peut pousser ce système à l'extrême, c'est ce que François Mulet a fait en travaillant avec des tomatiers sous serre chauffée. L'idée était de passer d'un système hydroponique hors sol à un système MSV. Pour mener son projet, une règle de 3 a été faite pour savoir quelle quantité de vers de terre était nécessaire pour nourrir les plants de tomates.

Ce modèle fonctionne très bien mais, il a un énorme désavantage : il faut apporter de la matière organique chaque année. Il n'est donc pas vraiment autofertile.

Tendre vers l'autonomie et l'autofertilité

Couverts végétaux

Une pratique qui existe, c'est d'implanter des couverts végétaux entre les cultures, par exemple l'hiver. Avec cette technique, on va mener une culture dont le but sera de produire de la biomasse qu'on va coucher afin de nourrir le sol.

Ici, un couvert de sorgho sous serre

Couvert de sorgho sous serre

Pour que ça fonctionne, il faut vraiment soigner son couvert pour générer la quantité de biomasse nécessaire. C'est en pratique assez difficile à faire, la quantité de photosynthèse en hiver n'est pas au niveau de l'été.

Yann Lopez s'est spécialisé dans cette pratique, mais ça semble encore compliqué :

Couvert permanent

Le précurseur des systèmes autofertiles en couvert permanent, c'est Masanobu Fukuoka. En 1975, il publie "La révolution d'un seul brin de paille" ou il explique comme il cultive du riz avec un couvert de trèfle et en hiver des céréales. Il laisse les pailles au sol à la fin de la culture et il pratique le semi à la volée à partir de graines dans des boules d'argile. Il explique également comment il gère ses agrumes de façon naturelle.

Avec son système, aucun apport extérieur n'est nécessaire et la terre est améliorée chaque année.

Malheureusement, côté légumes, cette technique ne semble pas fonctionner pour Masanobu Fukuoka.

Ces 4 dernières années, François Mulet a travaillé sur un système de couvert permanent pour rendre le système MSV autofertile. Plusieurs modalités ont été testées :

  • un témoin avec de la matière organique morte apportée chaque année
  • un double ration matière organique morte apportée chaque année
  • couvert de trèfle blanc
  • couvert de menthe
  • couvert de graminées
  • etc

La quantité de matière sèche produite (tiges et feuilles de tomates) a été mesurée pour chaque modalité, ainsi que plusieurs métriques de fertilité.

Dans leurs résultats, pas de différence flagrante sur le couvert de trèfles blanc, une baisse de 10 à 15% sur les modalités menthe et graminées.

Mais comment ça marche ?

Le principe est simple, on va planter du trèfle blanc et créer des lignes de plantation tous les 50 cm (la place pour passer une tondeuse, généralement de 40 cm de large). Le trèfle sera tondu régulièrement ce qui apportera de la matière organique au sol. Les exsudats racinaires du trèfle permettront aussi de nourrir le sol.

Capture de concombres sur du trèfle blanc présenté dans la formation :

Culture de concombre sous serre avec un couvert permanent de trèfle

Avec un système de couvert permanent, plus besoin d'apporter de la matière organique chaque année, le système devient autofertile.

Conduite en serre tropicale

Une des autres expérimentations menées par François Mulet est la conduite en serre tropicale. L'idée est simple : humidifier l'air quand il fait chaud, mais pour quoi faire ?

Un des avantages de la serre, c'est de pouvoir cultiver très tôt dans l'année. En contrepartie, l'été, les températures peuvent être très élevées et les plantes peuvent souffrir de la chaleur.

Faire monter l'humidité de l'air permet de gérer des températures plus élevées et certaines plantes poussent même mieux dans un climat tropical.

Dans les expérimentations menées, les cultures d'été s'en sortent à priori très bien :

  • tomates
  • poivrons
  • aubergines
  • concombres
  • courgettes
  • melons
  • patates douces
  • pomme de terre

Autre impact positif, le mildiou disparait complètement avec des températures élevées même s'il fait froid et humide la nuit (à condition qu'il fasse au-dessus de 25°C la journée). À plus de 35 degrés, les pucerons meurent également au bout de 2 ou 3 jours.

Comment mener un serre en climat tropical ?

Ce qu'on va chercher à faire, c'est avoir des températures chaudes et humides en journée et froides et sèches la nuit.

Au printemps et à l'automne, on va plutôt laisser la serre fermée pour faire monter la température. Comme les nuits sont fraiches et les journées pas toujours chaudes ou ensoleillées, il va falloir controller l'humidité. Par exemple ouvrir le soir pour faire baisser l'humidité, et fermer le matin pour faire monter la température.

L'été, il va falloir trouver le bon niveau d'ouverture de la serre pour pouvoir garder l'humidité sans que la température monte trop haut. On peut garder la serre humide car, les journées étant chaudes, il n'y a pas de risque de propagation de mildiou.

Pour faire monter l'humidité, c'est assez simple, on utilise de l'arrosage par brumisation ou aspersion.

Et en pratique ?

Si on reprend tout, on va chercher à faire pousser des plantes dans un couvert permanent de trèfle blanc, avec une gestion en serre tropicale.

Pour les plantes de grande taille (tomates, poivrons, aubergines, concombres, courgettes ...) :

  • on tond le trèfle très fort pour l'affaiblir
  • on plante les plantes qui doivent déjà être bien développés
  • les rangs doivent être assez espacés pour pouvoir passer la tondeuse
  • on arrose par aspersion ou brumisation pour arroser pas seulement les plantes mais, aussi le couvert
  • le trèfle est tondu régulièrement
  • pour poivrons et aubergines, on peut fermer la serre avant de planter pour faire monter la température du sol

Pour les poireaux ou oignons :

  • on plante serré, car les rangs doivent être assez espacés pour pouvoir passer la tondeuse

Pour les courges :

  • idem, serré sur le rang
  • espacement de 80 cm pour pouvoir tondre assez souvent au début
  • à la fin, l'espace est recouvert, mais le trèfle continue de pousser dessous

Pour les carottes et salades : petit challenge !

Quelle que soit la culture, il faut s'assurer de garder le sol humide pour ne pas faire tomber la fertilité. Il y a également un petit challenge sur la conduite de la serre tropicale pour gérer l'hygrométrie en fonction des températures.

Et dans mon jardin ?

Personnellement, je n'ai jamais eu de grandes ambitions pour mon jardin. C'est un sujet qui me passionne, mais pour lequel j'ai peu de temps à consacrer. J'ai bien aimé et suivit l'approche de Damien Dekarz à travers son jardin de A à Z et ses conseils avisés sur tout un tas de sujets.

Jusqu'à présent, j'achète de la paille et je récupère du broyat et du compost à la déchetterie. Je fais du compostage de surface, c'est-à-dire que je dépose mes déchets de cuisine sous la paille à des endroits différents à chaque fois.

Dans l'ensemble ça se passe pas mal, je suis autonome en sauce tomates, poireaux et butternut, je mange des haricots verts l'été et comme tous les jardiniers, je produis très rapidement trop de courgettes.

Par contre, je n'ai jamais réussi à avoir de bonnes récoltes de poivrons et aubergines, et pour les concombres ça dépend des années.

Image de mon jardin

Cette année, ça ne s'est pas très bien passé, j'ai planté tard, j'ai mal arrosé, j'ai eu des récoltes tardives, et j'étais pas content. Et quand on est pas content, ça agasse et quand ça agasse ça donne envie d'agir.

Pour améliorer mon jardin, j'ai décidé de mettre une serre pour le printemps prochain et bien évidemment de tester le couvert permanent de trèfle blanc et la serre tropicale (vous ne l'aviez pas vu venir dis donc). Pour ça j'ai préparé une parcelle avec comme préconisé un apport de MO. Ma terre n'étant pas argileuse, je ne crains pas la compaction, en revanche, elle est calcaire et très pauvre en matière organique et aucun ver de terre. L'apport initial est donc un prérequis.

Nouvelle parcelle en cours de restauration

Je mettrai la serre et le système d'arrosage en place à la fin de l'hiver.

Comme on l'a vu précédemment, ça nécessite un contrôle de l'humidité et de l'arrosage assez précis et donc de l'automatisation. Et donc un peu de domotique !

Le projet domotique

L'idée de base, c'est de pouvoir :

  • à minima automatiser l'arrosage à interval régulier
  • conditionner l'arrosage en fonction de l'humidité du sol
  • pouvoir augmenter l'humidité de l'air en fonction de la température et de l'humidité ambiante

Après quelques recherches sur la domotique (que je découvre complétement au passage), je découvre le protocol zigbee qui a l'air d'être assez utilisé, avec pas mal d'objets le supportent.

À la maison, j'ai une vieille raspberry pi 1B qui traine, on va voir ce qu'elle a dans le ventre.

En faisant quelques recherches, j'ai trouvé ces 2 produits qui permettent de faire ce que je veux :

  • Router zigbeeLe router zigbee
  • Repeteur de signal sigbeeUn repeteur de signal pour l'extérieur
  • Sonde de température zigbeeLe capteur de température et d'humidité étanche
  • Electrovanne zigbeeLa vanne d'eau

Pour l'humidité du sol, toutes les sondes ont l'air merdiques, affaire à suivre...

Pour intéragir avec ces objets, le server zigbee2mqtt, permet de publier les données des capteurs sur un broker mqtt.

Ça donne donc le schéma suivant :

Schéma d'architecture représentant les composante zigbee et leurs interactions

Côté applicatif, j'ai profité de ce projet pour faire un peu de RUST. La raspberry pi 1B n'étant pas très puissante, c'est l'occasion de tester.

J'écoute les messages mqtt et je stocke les données dans une base de données SQLite. Pour déclencher des actions, il faut à l'inverse publier dans le bon topic, à ce niveau-là rien de compliqué, c'est du dév normal.

Par contre, au niveau de l'intégration avec la raspberry pi, ça c'est avéré un peu galère.

Cross compilation

La raspberry pi 1B est en armv6, ayant fait du JAVA toute ma vie, les histoires de target, linker, toolchain, etc, c'est très loin de mon univers. Je m'en suis sorti avec cross qui permet de cross compiler facilement.

Zigbee2mqtt

J'ai tenté de faire tourner zigbee2mqtt à partir de nodejs mais ça n'a pas voulu. Bien qu'il existe des versions de nodejs (non officielles) pour armv6, ça n'a pas fonctionné, les scripts post install ne voulaient pas s'exécuter à priori à cause de la version de GCC.

Finalement, j'ai réussi à faire tourner zigbee2mqtt en utilisant l'image docker.

Est-ce que ça marche ?

Au final ça fonctionne mais... c'est lent, très lent, aussi rapide qu'un escargot au galop, la raspberry pi galère !

En discutant avec mon poto/collègue Quentin (qui au passage fait de très bonnes sauces pimentées), j'apprends qu'il a une vieille raspberry pi 3B qui traine, en migrant dessus, ça marche !

Les mesures de températures remontent correctement et je peux piloter l'arrosage à distance, victoire !

Maintenant, il reste à ajouter des conditions d'arrosage suivant l'humidité du sol et de l'air mais, la base est là.

Conclusion

Cet article assez long était bien évidemment un prétexte pour parler de jardinage !

Contrairement à l'approche traditionnelle, ou on joue les petits chimistes en apportant des engrais, dans l'approche sur sol vivant on s'appuyer sur les fonctionnements naturels et les optimisant. Au premier abord, la cohabitation avec la technologie ne semble pas évidente mais, on voit qu'elle peut être utile.

Au passage, ce mode de jardinage permet de séquestrer du CO₂ dans le sol et on contribue un peu à améliorer le climat et la biodiversité et ça, c'est cool !

Maintenant, il reste à voir si tout ça va fonctionner correctement, la réponse l'année prochaine !

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